I
Depuis que le jour s’était levé, la pluie tombait
sans discontinuer, tantôt fine et vicieuse, tantôt grosse et violente. A à
peine 15 heures, la pénombre qui régnait laissait penser que la nuit était sur
le point de tomber. Aussi loin que pouvait porter le regard, et même en y portant
la plus grande des attentions, il était impossible de trouver la moindre touche
de bleu, même pale, dans l’immensité du ciel qui s’étendait au-dessus de la
campagne Seine-et-Marnaise. En cette seconde partie d’octobre, l’automne avait
pris sa place, reléguant au rang du souvenir les chaudes journées estivales.
Tous feux allumés, une Golf noire
fendait les trombes d’eau qui s’abattait sur la D231, lancée à vive allure,
conduite par un homme d’une quarantaine d’année que ce déluge ne semblait pas
perturber. Le gyrophare, posé sur le tableau de bord, jetait des lumières
bleutées, tournoyantes, dans tout l’habitacle, qui ne perturbait pas plus le
conducteur à l’expression tendue, fermée, fort peu engageante. En fait, en
y regardant de plus près, tout en cet homme inspirait plus la crainte que la
sympathie : carrure d’un boxer poids lourd, nez cassé, barbe de plusieurs
jours, jean, baskets, parka façon treillis militaire… si l’on venait à le
croiser dans une rue, il donnerait envie de changer aussitôt de trottoir. Comme
une cerise sur ce gâteau indigeste, une bosse déformait le côté gauche de sa
parka, une proéminence causée par la crosse de son 357 Magnum. Oui, nous le
croisions dans une rue, nous le prendrions sûrement pour un dangereux repris de
justice, certainement pas pour le fonctionnaire du SRPJ (Service Régional de la Police Judiciaire) qu’il était en
fait.
Sa passagère n’offrait pas du tout
la même impression négative. Chaussures de sport, de la marque aux trois
bandes, elle était vêtue d’un jean large et d’un pull en grosse laine, sous un
imperméable sombre, si ample qu’il était impossible de deviner ses contours de
femme, pas plus que ne se devinait le
Sig Sauer (pistolet semi-automatique 9mm Parabellum ultra léger) qu’elle
portait à la ceinture. Ses longs cheveux, noir de jais, étaient attachés en
queue de cheval et son visage, parsemé de quelques charmantes rides d’une
trentenaire, présentait des traits fins et doux, s’ouvrant sur deux grands yeux
noirs en forme d’amande et surmontés de longs cils courbés. Bien que ne portant
aucun atour pouvant mettre en valeur sa féminité, et si l’on faisait fi de son
accoutrement pour se concentrer
uniquement sur la partie visible de sa féminité, on se rendait vite compte
combien Keira Leroy était une femme splendide, débordante de charme, une de ces
femmes qui ne laissent jamais indifférent.
La voiture roula dans un profond
nid-de-poule, ce qui provoqua une secousse qui tira Keira des réflexions dans
lesquelles elle s’était plongée pour faire passer le temps.
-
Nom
de Dieu, Franck ! Tu veux nous tuer ?!
-
Ça
va, je sais encore ce que je fais !
-
Mais
pourquoi tu roules si vite ? C’est un mort qui nous attend là-bas : il
ne va certainement pas s’enfuir !
-
Plus
vite on arrive et plus vite on repart.
-
Pourquoi ?
Tu as un train à prendre ?
-
Je
n’ai pas plus envie d’être avec toi, que toi d’être avec moi, alors, fais pas
chier !
-
Monsieur
à ses humeurs !
-
Ta
gueule, Leroy !
Keira Leroy et Franck Mercier ne
pouvaient plus se voir, même pas en peinture. Normalement, ils ne travaillaient
pas en équipe, mais un malheureux concours de circonstances les avait amenés à
partir ensemble sur ce qui était peut-être une scène de crime. Toutefois, leurs
relations n’avaient pas toujours été aussi tendues, à la limite de
l’agressivité gratuite. Il y eut une époque, pas si lointaine, lorsque Keira
commençait à prendre ses marques au SRPJ
de Melun, où ils s’étaient bien entendus, au point d’en devenir amants. Leur
liaison n’avait été que de très courte durée, juste le temps que la jeune femme
comprenne qui était Franck, une brute épaisse à l’intelligence très relative,
aimé par personne, et traînant de sombres affaires derrière lui. Aujourd’hui,
avec le recul, elle ne comprenait pas comment elle avait pu faire une telle
erreur et se demandait pourquoi les affaires internes ne s’étaient pas encore
penchées sur lui.
Franck réduisit brusquement son
allure ; ils venaient de passer le panneau indiquant qu’ils entraient dans
la ville de Provins. Il bifurqua à gauche pour prendre la petite côte qui menait
sur les hauteurs de la ville, là où les vestiges médiévaux étaient encore très
présents.
Située sur le plateau Briard, bâtie autour d’un
promontoire au confluent des vallées de la Voulzie et du Durteint, une légende
dit que Provins tient son nom du général romain Probus qui y fit cultiver des vignes en devenant empereur en 276,
annulant ainsi l’édit de Domitrius
qui avait interdit l’implantation de vignobles en terres de Gaule, afin de
favoriser le vin italien.
Mais, si l’origine de son nom ne
tient peut-être qu’à un conte érodé par le temps, il est un fait certain :
au fil des siècles, profitant d’une situation géographique avantageuse, Provins
va prospérer tant et si bien, que la cité frappera sa propre monnaie (le denier
provinois) et deviendra la capitale des comtes de Champagne et troisième ville
de France, derrière Paris et Reims. 80000 habitants y vivront, contre à peine
12200 de nos jours.
Inscrite au patrimoine mondial de
l’UNESCO, la ville tire aujourd’hui
une grande partie de son économie des confiseries, et de divers produits
dérivés, à base de la célèbre rose de Provins, une variété importée par Thibaut
de Champagne, en 1240, de retour des croisades. Les rosiers sont de forme
compacte, tout en arrondi, avec un feuillage d’un vert clair et c’est en juin
qu’apparaissent les feuilles semi-doubles, de 8 cm de diamètre, avec des
anthères jaunes proéminentes. D’un rouge carmin très brillant, la rose de
Provins possède un parfum floral puissant et des fruits sphériques rouge
orangé.
Une autre partie importante de
l’économie de la ville réside dans le secteur du tourisme, un aspect qui fut,
sans doute, négligé un temps, mais qui, aujourd’hui, draine quelques 220000
visiteurs par an.
En ce mardi d’octobre, nous étions bien loin de
l’affluence d’un mois de juillet ou août. Sirène hurlante, la Golf passa sans
encombre la porte Saint-Jean, d’où partent les vestiges, plus ou moins bien
conservés, de la haute muraille médiévale, pour foncer dans la rue du même nom.
Passé la Grange aux Dîmes, Franck donna un violent coup de frein et tourna
brutalement à droite, rue Couverte, pour s’arrêter net sur la Place du Chatel.
-
Qu’est-ce
que c’est que ce bordel ? s’exclama-t-il.
Une foule conséquente de gens
s’était formée sur un large coin de la place, sans doute beaucoup de provinois,
mais aussi de nombreux journalistes de la presse nationale. Depuis la voiture,
Keira et Franck aperçurent des caméras de BFM TV et quelques camions régis
d’autres grandes chaînes télévisés. Un important cordon policier avait été mis
en place pour contenir tout ce beau monde au centre de la place.
-
Qu’est-ce
que c’est que ce bordel ? répéta Franck qui tentait de se frayer un
passage entre les badauds, à coup de klaxon furieux.
-
On
ne va pas arriver à avancer plus loin. Gare-toi là : on va continuer à
pied.
-
T’es
folle ! T’as vu ce qui tombe ?
-
Et
alors ? Tu n’es pas fait en sucre ? Si ?
-
Fais
chier !
Keira poussa un soupir
d’agacement, puis dégrafa sa ceinture de sécurité et ouvrit rageusement la
portière.
-
Fais
comme tu veux ! lança-t-elle en quittant la voiture.
Toujours à l’affût d’informations pouvant s’avérer
croustillantes, la presse laisse traîner continuellement des oreilles sur les
ondes radio de la police et gendarmerie nationale ; ceci n’est pas, bien
entendu, un secret pour les personnes qui sont écoutées, et qui usent parfois
de stratagème complexe pour rendre des messages incompréhensibles. Keira
s’interrogea sur ce qui avait pu déclencher une telle affluence médiatique en
ce lieu et commençait à se demander ce qui l’attendait de l’autre côté de la
place.
Elle n’avait pas eu beaucoup
d’informations concernant la possible scène de crime. En fait, tout c’était
passé très vite : elle était à peine arrivée dans les locaux du SRPJ, que son patron lui était tombée
dessus pour lui annoncer qu’elle partait, avec Franck sur un possible homicide,
un jeune homme de race blanche, retrouvé mort chez lui. A cet instant, cela
semblait être les seules informations dont disposait la police ; une heure
à peine s’était écoulée, mais il lui paraissait que beaucoup d’autres détails
avaient dû tomber entre temps.
Elle se faufila entre des
journalistes de LCI et présenta sa
carte de capitaine au policier qui se trouva nez-à-nez avec elle. Ce dernier
s’écarta en lui indiquant où se rendre d’un simple geste de la main. La pluie
avait baissé d’intensité, comme si elle laissait un espoir d’accalmie, mais les
gouttes, fines et glacées, se glissaient désagréablement sous le col de
l’imperméable de la jeune femme. Elle fourra ses mains dans les poches et
rentra le coup dans les épaules, puis gagna, d’un pas rapide, la rue Maufranc. Plusieurs
voitures de police et un véhicule du SMUR
étaient stationnés devant l’entrée d’une impasse. Keira dut une nouvelle fois
présenter sa carte avant de pouvoir accéder à l’impasse ; devant elle, se
dressait une imposante bâtisse, sans doute très ancienne, dont tous les volets
en bois rouge étaient clos. Sur le toit, une haute cheminée crachait des
volutes blanches qui semblaient s’enrouler autour des gouttes de pluies, étrange
vision qui donnait l’impression que la fumée souhaitait retenir prisonnières
les gouttes de pluie, ou bien danser avec elles.
Après avoir franchi la porte
d’entrée, elle aussi gardée par un policier en faction, Keira se trouva dans
une pièce aux dimensions vertigineuses, comme si elle venait de mettre les
pieds dans un loft, dont le modernisme de l’ameublement tranchait avec l’aspect
vétuste de la façade de la maison. Elle jeta un long regard circulaire et
remarqua que les lieux étaient savamment compartimentés par l’agencement des
meubles. Sur un large coin gauche, on devinait parfaitement l’espace salon,
composé de deux grand canapés en cuir blanc, disposés en « L » autour
d’une table basse au design très futuriste, et d’un téléviseur écran plat, fixé
au mur, dont Keira ignorait qu’il puisse exister une si grande taille. Il était
allumé sur la chaine d’informations de BFM, mais, si elle devina, en reconnaissant
la place qu’elle venait de traverser, que l’on parlait de Provins, elle ne
pouvait entendre ce qu’il se disait, le son ayant été coupé.
Elle poursuivit son tour
d’horizon, s’arrêtant un instant sur les détails composant la partie
salle-à-manger, admirant la fonctionnalité de la cuisine américaine, placée au centre
de la pièce, puis s’intéressa aux personnes en combinaison blanche, gantées et
portant des masques couvrant nez et bouche, qui s’affairaient, telles des
fourmis travailleuses, dans tous les coins et recoins de l’immense pièce, relevant
des empreintes, cherchant des indices ; c’était la première fois qu’elle
voyait autant de personnes de la Police
Technique et Scientifique dans un même lieu.
-
On
se croirait dans un épisode des Experts, pensa-t-elle tout haut.
-
D’abord
ces charognards de journalistes et maintenant le grand déballage de moyens… Si
tu veux mon avis, cette histoire pue !
Keira tourna la tête et observa
la mine songeuse de Franck qui venait tout juste de la rejoindre. Elle savait
qu’il avait raison : toute cette activité, qui dégageait une atmosphère
électrique, très fébrile, n’avait rien de normale.
-
Je
ne peux pas le croire ! Tu fais à nouveau équipe avec ce déjanté ?
Keira afficha un large sourire
lumineux à l’approche de la chef légiste de l’Institut Médico Légal du Centre
Hospitalier de Melun.
-
Bonjour
Elise ! Cela fait un bail !
-
C’est
vrai, à croire que l’absence de corps à autopsier t’a fait oublier mon
existence ! répondit la légiste sur un ton de reproche.
-
Ne
dis pas de bêtises ; j’ai été pas mal occupée ces derniers mois.
-
Et
si tu m’expliquais ce que tu as fait de mal, pour que Bartoli te remette en
équipe avec… lui ? demanda-t-elle en pointant Franck du bout du nez.
A bientôt 56 ans, Elise Marchetti,
italienne de par sa mère, en paraissait tout au plus 40, tant elle avait
toujours sur conserver une grande fraîcheur, une joie de vivre en total
contraste avec la profession morbide qu’elle exerçait depuis tant d’années.
Elle possédait aussi un franc parlé que certains considéraient dérangeant et
qui lui avait parfois joué de mauvais tours, mais dont elle s’amusait tout le
temps. Elle n’avait pas pour habitude de cacher ses sentiments ou
ressentiments, qu’ils soient positifs ou négatifs et Keira avait très vite
appris à apprécier cette femme volubile à sa juste valeur.
-
Je
n’ai rien fait, répondit-elle en riant, mais Olivier a eu un accident et il est
en arrêt. Quant à celui de Franck, il est en congés.
-
Pourquoi ?
Il y a encore un équipier qui veut travailler avec toi ? renchérit Elise
sur un ton des plus ironiques, en plantant un regard sombre dans les yeux du
policier.
-
Toi,
je crois que cela fait trop longtemps que t’as pas baiser ! maugréa
Franck.
-
Ravie
de constater que ton langage est toujours aussi châtié !
-
On
continue les amabilités, ou bien on s’intéresse enfin à ce qui nous réunis
ici ? C’est quoi tout ce bordel ?
La légiste et le flic bourru se
toisèrent du regard, prêts à s’écharper au moindre nouveau mot de travers. Plus
que de l’antipathie, il y avait entre eux une sorte de haine farouche, une rage
latente qui les opposait depuis aussi longtemps que Keira les connaissait tous
deux. Ne voulant pas que la situation dérape, elle décida d’intervenir en
revenant sur le sujet du moment.
-
Au-delà
de sa façon de présenter les choses, je dois reconnaître que Franck à raison
sur un point : pourquoi y-a-t-il tout ce monde ici ?
-
Ma
chérie, tu ne me poses pas la bonne question, répondit Elise dont le visage
s’était subitement radouci.
-
Et
quelle est donc la bonne question ?
-
Tu
pourrais me demander chez qui nous sommes, ou, encore, à qui appartient cette
maison…
-
Okay ;
à qui appartient cette maison ?
-
A
Stéphane Marques !
-
Marques ?
répéta Franck. Le député Marques ?
-
Député
et candidat aux futures primaires pour la présidence de son parti, précisa
Elise. L’un des hommes les plus puissants de l’opposition actuelle et qui,
selon toute vraisemblance, se portera candidat à la présidentielle de 2017. La
victime n’est autre que son fils !
Keira analysa rapidement ces
nouvelles informations. A présent, elle pouvait comprendre la présence massive
des journalistes : au cours des huit derniers mois, le député Marques s’était
souvent retrouvé en première ligne de tous les grands journaux nationaux,
presse écrite, radio, télévision, mais elle ne s’expliquait toujours pas le
déploiement des moyens policiers mis en œuvre sur cette affaire. Le ministère
souffrait de la politique d’austérité du gouvernement en place, même si ce
dernier refusait toujours d’employer officiellement le terme
« austère », et faisait donc des coupes drastiques dans les effectifs
de la police, comme dans les moyens mis à leur disposition pour mener à bien
leurs enquêtes.
-
Les
circonstances et causes de la mort, reprit Elise qui semblait avoir lu dans les
pensées de Keira, bien qu’encore inexpliquées, pourrait faire un grand tort à
la carrière politique de Marques… surtout si la presse venait à s’en emparer.
-
Qu’entends-tu
par « encore inexpliquées » ? demanda Keira.
-
Que
je n’ai rien pu déterminer car on ne m’a pas encore laissé approcher le corps
de la victime. Mais la scène, ou mise en scène, est assez parlante pour qu’une
certaine presse se déchaîne contre le député, jusqu’à le tailler en
pièce !
-
Bon !
s’exclama Franck excédé par le jeu des mystères, on ne va pas y passer la
journée ! Il est où ton macchabée ?
Elise lui lança un regard si
cinglant, que, derrière sa massive musculature, Franck ne put s’empêcher de
frémir en baissant les yeux.
-
Ça
se passe à l’étage ; suivez-moi.
Keira paraissait fascinée par l’étrange et triste
spectacle qui s’offrait à sa vue. A l’inverse de la grande pièce du bas, la
chambre était relativement petite et très sommairement meublée : une
armoire métallique, servant sans doute de dressing, un petit secrétaire et un
lit à hauts pieds. Une ampoule, fixée au plafond par son simple fil électrique,
délivrait une lumière jaunâtre, quelque peu glauque, qui rajoutait une touche
étrange, indéfinissable, à l’ensemble du tableau. Allongé sur le lit,
Christophe Marques, 28 ans, semblait dormir paisiblement, la tête tournée sur
le côté droit. Entièrement nu, il avait les pieds et mains liés aux quatre
coins du lit par de fines cordelettes dorées. Sa verge était enfermée dans une
sorte de petite boite transparente fermée par un minuscule cadenas noir. Un
anneau, à première vue en silicone, enserrait ses testicules à la base du sexe
et se poursuivait par une longue tige courbée qui s’enfonçait entre les fesses,
avant de disparaître dans l’anus. A présent, Keira comprenait tout le sens des
paroles d’Elise.
Le député Marques était un
fervent opposant au mariage pour tous, considérant l’homosexualité comme une
dérive pouvant mener au chaos, et il condamnait, combattait, certaines
pratiques sexuelles induites, selon ses propres termes, par la prolifération
incontrôlée des films pornographiques sur le Net. Qu’une photo de son fils, de
cette scène, apparaisse dans un journal et sa crédibilité en prendrait un sacré
coup ; il perdrait très certainement bon nombre de ses soutiens, pour ne
pas dire tous, et sa carrière politique s’arrêterait net.
Cependant, Keira sentait qu’il
lui manquait toujours une information importante. La présence des journalistes
étaient expliqués, certes, même s’ils ignoraient le tableau de cette chambre,
mais pas celle, aussi importante, du personnel de la PTS, dont trois autres membres inspectaient la chambre dans les
moindres détails. Elle se décala un peu sur la droite du lit, tout en
respectant une certaine distance afin de ne pas polluer la scène de crime, et
scruta attentivement le corps inerte, y cherchant des traces visibles de
blessures ; mais rien ne lui parut suspect, en tout cas, pas au point de
découvrir une cause de décès. Son regard finit par se poser sur les yeux bleu,
encore grands ouverts, et sans vie du jeune homme ; un désagréable frisson
lui remonta le long de la colonne vertébrale.
-
Du
SM qui aura mal tourné ! avança Franck d’un ton très convaincu.
-
Un
peu hâtif comme conclusion, rétorqua Keira. Je ne vois aucunes blessures
apparentes… La nuque ne me semble pas brisée… On l’a peut-être attaché, puis
étouffé… Vous en avez encore pour longtemps ? demanda-t-elle à l’une des
hommes en combinaison blanche.
-
Le
corps sera à vous d’ici une dizaine de minutes, répondit l’homme après un court
instant de réflexion.
Keira revint auprès de la légiste
et de son équipier.
-
Tu
tires des conclusions hâtives, dit-elle à ce dernier à voix basse, mais tu as
certainement raison sur un point : il y a trop de monde ici qui recherche
un peu trop précautionneusement le plus petit des indices.
-
Et
cela veut dire quoi, selon toi ?
-
Je
n’en ai pas la moindre idée… Tout ce que je peux dire c’est que, jeu sexuel qui
aurait mal tourné ou bien meurtre, la personne qui était avec la victime, car
il a bien fallu quelqu’un pour l’attacher ainsi, cette personne est partie en
étant consciente que le fils Marques était mort… Qui est arrivé en premier sur
les lieux ? demanda-t-elle à Elise.
-
Les
flics de Provins. Ils sont partis il y a une vingtaine de minutes, environ,
avec leur témoin.
-
Il
y a un témoin ?
-
Je
crois qu’il s’agit de la femme de ménage. C’est elle qui aurait découvert le corps.
-
Et
quelle découverte ! Elle peut se faire un pont d’or avec ça ! ricana
Franck.
Bien que la remarque ne fût pas
totalement dénuée de sens, bien au contraire, Keira ne put s’empêcher de jeter
un regard incendiaire à son équipier. Elle avait beau faire tous les efforts
possibles, elle ne supportait plus sa présence. Cela n’avait pas uniquement à
voir avec sa liaison passée : c’était tout le personnage qu’il incarnait
qui la dégoutait aujourd’hui.
-
File
au commissariat de Provins, lui dit-elle, et vois ce que tu peux apprendre de
ce témoin. Moi, je vais rester encore un peu et tenter d’éclaircir certains
points.
-
Oh !
Tu te prends pour la chef, ou je rêve ?
Le visage de Keira s’élargit dans
un grand sourire de satisfaction, un sourire ironique et victorieux à la fois.
-
C’est
pourtant le cas, répondit-elle d’un ton glacial. Rappelle-toi que j’ai réussi
le concours : depuis la semaine dernière, je suis capitaine de police… et
toi, tu n’es que lieutenant ! Mais peut-être n’étais-tu pas au
courant ?
Franck baissa le regard sans rien
trouver à répondre ; en fait, il avait oublié ce détail pourtant si
important. Keira savoura le moment, tandis qu’Elise jubilait.
-
Va
au commissariat, répéta Keira. C’est un ordre ! Et ne t’occupe pas de moi.
Dès que tu auras fini, tu rentres au SRPJ pour taper ton rapport. Moi, je
trouverai quelqu’un pour me faire raccompagner.
Place du Chatel, l’effervescence était encore montée
d’un cran. De nombreuses rumeurs couraient à présent, parmi les provinois, sur
ce qu’il se passait, ou s’était passé, dans la maison du député, des rumeurs
dont les journalistes se faisaient le relais pour écrire une histoire, puis la
défaire, un peu plus tard, pour en écrire une autre, puis une autre encore. Au
milieu de la centaine de personnes, une seule se taisait, ne colportait aucun
ragot, mais se contentait simplement d’épier, d’écouter, sans attirer
l’attention. C’était un homme de haute stature, portant un chapeau noir à large
bord qui le protégeait de la pluie fine. Il estima qu’il en avait appris assez,
c’est-à-dire rien du tout, car personne ne savait rien, et qu’il était temps de
partir. Il redressa le col de son blouson et s’extirpa de la foule compacte.
Faisant des pas très allongés, il s’engouffra dans la rue Saint-Thibault où il
retrouva sa voiture. Une fois installé au volant, il retira son chapeau et
ouvrit son blouson. Il était chauve et une veuve noire, dont les pattes avant
descendaient jusqu’à sa nuque, était tatouée sur la base de son crâne. Son
visage était tendu et son regard affichait une certaine anxiété.
-
Quelle
merde ! pensa-t-il tout haut. Quelle merde !
Il ferma un instant les yeux et
réfléchit sur la manière dont il allait pouvoir annoncer cela, puis il prit une
profonde inspiration et sortit son téléphone de la poche intérieure de son
blouson. Ce faisant, il découvrit un instant le holster d’épaule dans lequel
pendait un Sig Sauer. Il composa rapidement le numéro d’un fixe parisien, puis
porta le mobile à son oreille. Au bout de la seconde sonnerie, une voix douce
et légèrement cristalline lui répondit.
-
Bonjour,
madame, dit-il.
-
Qu’y-a-t-il ?
-
Nous
avons un problème.
-
Quel
genre de problème ?
-
Le
fils Marques est mort.
Il y eut un silence durant lequel
l’homme devina que son interlocutrice emmagasinait et analysait l’information
qu’il venait de lui communiquer.
-
Si
vous m’appelez pour me dire ceci, c’est que cette mort à une cause non
naturelle, je suppose ?
-
Oui
et non.
-
Pouvez-vous
être plus clair ?
-
Il
était avec Liliane. D’après ce que j’ai pu comprendre de ses explications, le
cœur du fils Marques aurait brusquement lâché.
Il y eut un autre silence, plus
long que le premier. Sans doute, l’interlocutrice cherchait à évaluer la
situation.
-
Quand
est-ce arrivé ?
-
Cette
nuit.
-
Liliane
n’aurait pas dû se trouver avec lui, cette nuit. Ce n’était pas prévu. Que
faisait-elle avec lui ?
-
Du
sexe.
-
Où
est-ce arrivé ?
-
Dans
la maison de Provins. Le jeu avait commencé.
-
Le
jeu ? Je ne comprends pas. Je n’avais pas missionné Liliane pour cette
nuit !
-
Ce
n’est pas ce qu’elle m’a dit.
-
Je
ne comprends pas… Vous avez fait le nettoyage ?
-
Je
l’ai su trop tardivement. Le SRPJ était là avant moi. Il y a aussi des
journalistes, beaucoup de journalistes.
-
Vous
n’êtes pas entré ?
-
J’appartiens
au 36. Je n’ai aucune raison valable d’être sur les lieux, tant que je n’en reçois
pas l’ordre de ma hiérarchie.
-
Bien
sûr… Où est Liliane à présent ?
-
Chez
moi.
-
Selon
vous, la police a-t-elle un moyen de remonter jusqu’à elle ?
-
Je
ne sais pas, mais ils ont sorti les gros moyens… Le risque est hautement
probable.
-
Voilà
qui est fâcheux.
-
Que
souhaitez-vous que je fasse ?
-
Rien,
pour le moment. Contentez-vous de m’amener Liliane, ce soir, au club.
-
Bien,
madame.
L’homme coupa la communication,
puis alla dans le journal des appels pour effacer le numéro qu’il venait de
composer. Au même instant, un éclair zébra le ciel noir et la voiture vibra
sous la puissance du tonnerre qui gronda aussitôt ; un rideau d’eau
s’abattit sur la voiture provoquant un vacarme assourdissant.
Située à la fois dans le 1er et 8eme
arrondissement de Paris, débutant rue de la Lingerie, près des Halles
centrales, pour se terminer rue Royale,
la rue Saint-Honoré, à ne pas confondre avec le boulevard du même nom, doit son
nom à l’église collégiale, aujourd’hui disparue, Saint-Honoré d’Amiens, qui se
trouvait dans le cloître Saint-Honoré. Elle fait partie des voies très
anciennes de la capitales, prolongement, vers l’ouest, du deucumanus maximus
gallo-romain, du temps où Paris s’appelait Lutèce.
Tout au long de son histoire, la
rue Saint-Honoré, simple chemin reliant Saint-Ouen, Argenteuil et Neuilly
jusqu’à la fin du XIIe siècle, connut de nombreuses évolutions et de nombreuses
appellations avant de devenir celle que les parisiens arpentent aujourd’hui.
Son histoire reste encore très apparente, assez facilement traçable pour qui
veut bien prendre le temps de lever le nez et lire les plaques et inscriptions
nichés dans les murs de certains bâtiments. Ainsi, en observant attentivement
la façade de la pharmacie se trouvant au numéro 115, on peut lire les
inscriptions suivantes : « Fabrique
d’extraits évaporés dans la vapeur et dans le vide » et « Produits chimiques et pharmaceutiques de
Bernard Derosne et Ossian Henry ». Non seulement cette pharmacie
existait déjà en 1715, mais Marie-Antoinette s’y fournissait en onguents et
produits de beauté ; il paraîtrait même que Hans Alex de Fersen y trouvait
l’encre sympathique qui lui permettait de correspondre secrètement avec la
reine.
Au 202, une plaque en hauteur
rappelle la présence de l’Académie Royale de musique, en fait une salle d’opéra
qui brûla en 1781, faisant 21 victimes. Entre les numéros 155 et 161, nous
trouvons l’hospice des Quinze-Vingts, fondé par Louis IX pour abriter 300 de
ses chevaliers ayant perdu la vue lors des croisades.
Alexandre Dumas père eut son
bureau au 216, de 1823 à 1830, époque où il travaillait pour le Duc d’Orléans,
futur Louis-Philippe 1er, et séjourna au 185, entre 1864 et 1866.
Au 284, se trouvait autrefois la
demeure du marquis Louis de Fontanes, poète et ami de François-René de
Chateaubriand et ce n’est qu’à quelque pas de ce numéro, au dernier étage d’un
immeuble en comptant six, que l’interlocutrice de l’homme à la veuve noire
avait pris ses quartiers parisiens.
-
Une
mauvaise nouvelle, madame ?
Madame fit lentement pivoter son
fauteuil en cuir noir. Sa chevelure retombait en vagues dorées de chaque côté
de ses épaules. Ses yeux, d’un gris hypnotisant, se plantèrent dans ceux de son
homme à tout faire : majordome, chauffeur, garde du corps et, à l’occasion,
amant.
-
Un
contretemps, répondit-elle d’une voix qui trahissait une pointe d’inquiétude.
-
Grave ?
-
Je
ne sais pas encore… Fâcheux, sans doute.
-
Y-a-t-il
quelque chose que je puisse faire ?
Elle tenait encore le téléphone
dans sa main et le faisait machinalement tourner dans ses doigts, comme si cela
l’aidait à réfléchir. Il y avait bien longtemps qu’elle n’avait plus ressentie
une telle sensation désagréable, mélange de nervosité et d’appréhension
incontrôlable, bien longtemps qu’elle n’avait plus eu le sentiment qu’une
situation était sur le point de lui échapper. Elle n’avait encore aucuns
détails concernant cette sombre histoire, et n’en aurait pas avant le soir, mais
son intuition lui soufflait que des jours, sinon difficiles, en tout cas très
compliqués se profilaient à l’horizon.
-
Oui,
finit-elle par répondre en posant le téléphone sur une table basse. J’ai besoin
de me détendre pour retrouver la clarté de mes esprits !
Elle décroisa ses longues jambes
fines, gainée dans une fine soie noire, et se leva de son fauteuil pour se
diriger, d’un pas lent mais décidé, vers son homme à tout faire. Lorsqu’elle
fut à sa hauteur, elle posa ses mains sur ses épaules et y exerça une pression
pour le faire se baisser. Une fois qu’il fut agenouillé à ses pieds, elle releva
sa jupe noire, découvrant des jarretières aux couleurs pourpres qui
maintenaient ses bas, courant le long de cuisses légèrement dorées, puis sa
culotte, faite d’un voile léger, sombre, aux bordures dentelées de rouge.
-
Suce-moi !
lança-t-elle sur un ton qui tenait plus d’un ordre, que d’une demande. Fais-moi
jouir avec ta bouche ! J’ai besoin d’un orgasme pour y voir plus clair.
L’homme ne marqua pas la plus
petite expression d’étonnement ; il était habitué à ce genre de demande
particulière de sa patronne, parfois même dans des lieux insolites, pas
toujours très adaptés. Il n’en retirait pas systématiquement du plaisir, si ce
n’est celui d’en donner, mais il aimait son employeuse, pas de cet amour qui
unit un couple lambda, mais d’un amour bien plus puissant, allant au-delà de
l’entendement. Il était prêt à tout pour elle, même à mourir, s’il le fallait
un jour.
Ce lien puissant avait commencé à se tisser quinze ans en
arrière, à New-York, alors que la jeune Mélissa sortait violemment de son
adolescence, qu’elle était perdue dans le chagrin causée par la mort de son
père et encore plus perdue dans les méandres obscurs, sournois, tortueux et
dangereux de la haute finance. Au fil des années, l’homme taciturne, ancien
marine, avait observé la transformation de la chrysalide, avait vu la frêle
jeune femme devenir de plus en plus forte, de plus en plus sûre d’elle, se
faisant craindre et haïr de ses ennemis ; en quelques années, poussée par
des évènements non choisis, Melissa était devenue une femme implacable,
machiavélique, sans pitié pour ses adversaires.
Il n’était pas devenu
immédiatement son amant ; durant de très longues années, il n’avait été
que son garde du corps, parfois son confident, toujours dans son ombre, prêt à
bondir sur tous ceux qui auraient le malheur de vouloir s’opposer trop
fermement à elle. Puis, cela s’était fait, un soir, sans aucune raison
particulière ; peut-être était-ce écrit, tout simplement. Il avait
aussitôt regretté ce moment d’égarement, mais pas elle et ils avaient
recommencé, pas régulièrement, mais très ponctuellement. Quelque part, ces
épisodes faisaient parties intégrantes de leur étrange relation.
Avec un profond respect et une
grande application, il approcha ses lèvres de l’intimité voilée, trésor des
trésors, dont il savait la source abondante. Un souffle, comme un long trait
chaud, balaya les cuisses de Mélissa avant de se transformer en une sorte de
courant électrique qui se propagea rapidement dans tout son être. Elle se
raidit, rejeta sa tête en arrière et ferma les yeux. Cela faisait bien
longtemps qu’elle avait appris les bénéfices d’un orgasme sur un esprit
perturbé par des pensées négatives. Elle n’aimait pas particulièrement se
servir ainsi de Mickael, comme s’il n’était rien de plus qu’un vulgaire objet à
donner du plaisir, mais, à cet instant, elle avait un besoin impérieux de
décompresser, de lâcher prise et elle savait l’homme fort habile avec sa langue
et sa bouche.
Il posa enfin ses lèvres dans la
chaleur moite de l’entrecuisse et Mélissa se tendit en jetant son bassin vers
l’avant. Un effluve de désir vint flatter ses narines et il se jeta aussitôt
sur le féminin sacré pour le baiser au travers de la culotte, des baisers qui
tenaient presque de la dévotion.
Melissa crispa ses doigts sur le
pan de sa jupe en laissant échapper un long soupir d’extase, puis elle lâcha le
vêtement qui, en retombant, recouvrit la tête de son amant. Elle laissa glisser
ses mains sur le coton, jusqu’à ce qu’elle sente le crane de Mickael sur lequel
elle appuya fermement. Elle ressentit immédiatement le plaquage plus net de la
bouche contre sa vulve et en trembla de plaisir.
Pris dans l’ivresse des senteurs
féminine, Mickael se mit à mordiller sauvagement la petite culotte, avant de se
mettre à la lécher à grands coups de langue. Petit à petit, sous la pression de
l’organe, le tissu s’insinua dans le sillon formé par les grandes lèvres
vaginales et s’imbiba des saveurs de la cyprine.
A mesure qu’elle se sentait
gagnée par l’excitation, les craintes et doutes qui s’étaient emparés de
Mélissa se dissipaient, comme si la longue langue râpeuse, en plus de la faire
mouiller si fort, de faire papillonner le creux de ses reins, arrivait à
aspirer toutes les idées noires qui avaient submergées son esprit quelques
minutes plus tôt.
Mickael fit glisser ses mains le
longs des cuisses de sa patronne, les fit passer sous la jupe et empoigna
fermement le fessier. Il le massa un moment, tout en continuant ses jeux de
langue, et sentait monter son propre désir ; son sexe s’était durci,
prenait de plus en plus de place dans son caleçon. Il savait qu’il devrait
aller se soulager dans les toilettes, plus tard, car il avait parfaitement
compris que cet épisode n’irait pas plus loin que le seul orgasme de sa
patronne, mais cela lui importait peu : entendre les gémissements du
plaisir qu’il procurait lui suffisait amplement ; tout le reste n’était
qu’un détail insignifiant.
Il stoppa son massage des fesses
et poussa la culotte sur un côté. Il aspira l’une des grandes lèvres vaginale
dans sa bouche, tira dessus, puis la libéra pour planter sa langue dans la
cavité qui ne cessait plus de lubrifier. Mélissa laissa échapper un cri et
commença à onduler vivement des hanches. Elle ressentait parfaitement bien la
langue qui s’activait en elle, telle une anguille électrisante. Des ondes
délicieuses montaient le long de ses mollets, s’amplifiaient dans ses cuisses,
pour exploser dans ses reins. A chacune de ces explosions, un flot de cyprine
se déversait dans la gorge de Mikael qui l’avalait avec un délice non feint.
Enfin, il cessa de fouiller la cavité vaginale, pour partir à l’assaut du
clitoris émergeant de son cocon. Il fit tournoyer sa langue autour du sublime
bouton, puis sur lui, lentement, rapidement, puis lentement encore, et finit
par se jeter sur lui à pleine bouche, l’aspirant entre ses lèvres, le suçant
sans ménagement.
Toute la pièce vibra des
gémissements répétés, des cris jetés sans demi-mesure, transformant
l’atmosphère, si tendue quelques instants auparavant, en un jardin des plaisirs
dont Eros aurait pu pâlir de jalousie.
Mélissa, perchée sur des
escarpins à hauts talons, se sentait de moins en moins sûre de son équilibre.
Ses jambes, de plus en plus cotonneuse, semblaient sur le point de se dérober
sous elle d’une seconde à l’autre. Ses reins brûlaient d’un délicieux feu
intérieur ; de longues vagues balayaient son ventre et venaient mourir, en
un enivrant ressac, à l’entrée de sa gorge, pour se transformer, une fois à
l’air libre, en de longues plaintes de bonheur. Arriva le moment où l’une
d’elle fut plus forte que les autres, comme un raz-de-marée qui lui donna
l’impression d’être soulevée du sol. Toutes les fibres de son corps se mirent à
vibrer ; elle crut que ses reins explosaient et elle perdit le contrôle de
son corps, de son esprit, prise toute entière dans les remous tumultueux de
l’orgasme.
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